Mon parcours d’autoconservation ovocytaire

Tout est dans le titre, ceci sera un article particulièrement intime. J’avais déjà parlé de mon endométriose diagnostiquée en décembre 2021 dans un précédent article (à retrouver ici). L’infertilité touche 30 à 40% des femmes atteintes d’endométriose, lors de mon diagnostic, prenant en considération mon âge, on m’a demandé de faire un bilan de fertilité. Les résultats ne se sont pas révélés positifs, je suis donc entrée dans un parcours AMP (assistance médicale à la procréation). C’est un processus long et complexe que j’avais envie de partager, de visibiliser.

Que s’est-il passé depuis décembre 2021 ? 

Comme je le disais dans mon précédent article, j’ai difficilement accepté de prendre la pilule en continu. La première que l’on m’a prescrite était un fiasco, j’ai dû cocher un grand nombre d’effets secondaires sur la liste. Spotting en continu, douleurs aux seins, acné, maux de tête, nausées… 6 mois d’enfer. Puis, on m’a prescrit une seconde pilule que je tolère nettement mieux, même si je pense qu’elle joue avec mon humeur, me plongeant parfois dans des états dépressifs. En revanche, cette pilule, que je prends comme traitement pour mon endométriose, n’est pas remboursée ! Oui, c’est une honte, un scandale. Je suis donc obligée de me rendre dans une pharmacie en particulier, car là-bas je sais que le tarif sera toujours le même, à savoir 29€ et des poussières pour 3 plaquettes de 28 jours. 

Depuis 2022, je suis toujours suivie par le même spécialiste et lors des examens annuels, nous avons eu la bonne surprise de constater, par IRM et par écho endovaginale, que mon endométriose, pourtant profonde et présente à plusieurs endroits, était pratiquement résorbée. Tu le vois venir le revers de la médaille ? Dans le cadre de ce même suivi, j’ai également fait un dosage d’AMH (hormone anti-müllerienne) afin de déceler un éventuel trouble de la fertilité. Bingo ! Mon résultat est faible, même très faible, pour une patiente de mon âge selon le médecin. Il pense alors à une erreur et me renvoie faire le test. Ce n’était pas une erreur, mon taux est bel et bien très faible. Aussitôt mon dossier passe dans le service de médecine de la reproduction. 

Je fais congeler mes ovocytes

Quelle drôle de sensation que de rentrer dans un service PMA. J’avais secrètement espéré toute ma vie de ne pas devoir passer par là. Maintenant, il faut faire le deuil de beaucoup de choses et passer par des tas d’interrogations. “Je ne pourrais pas avoir d’enfant naturellement”, “Est-ce que j’aurais envie d’adopter un enfant ?”, “Pourquoi moi ?”, “A quoi bon autant d’années de souffrances si je ne peux même pas avoir d’enfant ?”, “Est-ce que je suis punie parce qu’à une période de ma vie j’ai dit que je ne voulais pas d’enfant ?”. Je te laisse imaginer les heures à cogiter et à pleurer. Désormais, je dois reprendre des forces pour affronter le parcours qui m’attend. Parce que oui, c’est un parcours de combattante. Que l’on soit seule ou accompagnée, ce parcours demande beaucoup de temps et d’énergie. Il faut de nombreux rendez-vous médicaux (médecin de la reproduction, biologiste, anesthésiste), et donc justifier un minimum ces absences à son employeur, mais il faut également passer toute une batterie d’examens (prise de sang, frottis, prélèvement vaginal, échographie endo pelvienne, IRM…). Évidemment aucun de ces rendez-vous ne peut se faire en dehors des heures de bureau, j’ai donc dû prendre un certain nombre de jours de congé.

Personnellement, j’ai décidé de commencer une thérapie en parallèle pour m’accompagner dans ce parcours qui est épuisant mentalement, d’ailleurs le service de la reproduction le recommande. Je crois que l’on n’est jamais préparé au manque d’empathie des médecins. Dans mon parcours, j’ai de la chance, beaucoup sont géniaux, mais il suffit de tomber sur un seul qui te considère comme un résultat d’analyse et non comme un être humain, pour te démoraliser. Ce parcours touche à notre intimité la plus profonde, on en vient à remettre en question sa féminité. Difficile de passer outre les vieux discours familiaux et patriarcaux. Et la question que l’on redoute le plus devient “Alors, c’est pour quand l’enfant ?”. Je vous en prie : arrêtez de demander aux femmes quand est-ce qu’elles auront un enfant ! Déjà cela nous ramène au seul rôle de la mère, comme si une femme n’avait pas d’autre choix que de devenir maman pour s’épanouir ! Ensuite, cela ne vous regarde pas ! Imaginez poser cette question à une femme qui vient de faire une fausse couche ? ça y est, vous comprenez le mal que peut causer cette question ? 

Comment se passe la stimulation ? 

Quasiment 1 an après avoir fait mon entrée dans ce service, j’ai une date pour le début de la stimulation. Ce qu’il faut savoir, c’est que l’on ne sait pas exactement quand cela tombera, j’ai été prévenu environ 3 mois à l’avance. Pour ma part, il était assez difficile psychologiquement de prévoir des choses sur le long terme ne connaissant pas la date de commencement de la stimulation. De fait, pendant près d’un an, cette échéance pesait comme une épée de Damoclès sur ma tête. Ici encore, je dois poser une matinée pour aller faire un cours d’éducation thérapeutique. Concrètement, une infirmière (adorable au demeurant) va répondre à toutes mes questions (et j’en ai beaucoup) et m’apprendre comment me faire les injections moi-même. Je précise que l’on peut également le faire faire par une infirmière libérale. Je dois arrêter la pilule une semaine avant le début des injections (attention les stimulations sont adaptées à chaque patiente, ce qui est vrai pour moi ne le sera pas forcément pour toi). Ensuite je dois me faire une piqûre (ventre ou cuisse) pendant 6 jours, puis j’ai mon premier rendez-vous de surveillance. Pour les piqûres c’est tout un cérémonial. Je dois préparer le produit moi-même pour ensuite me l’injecter (car le stylo pré-rempli est en rupture de stock depuis des mois…), le tout en respectant les normes d’hygiène. Globalement mes journées tournent autour de ça, ne pas oublier de faire ma piqûre à une heure bien précise. C’est souvent le soir, en tout cas ce l’était pour moi, donc il est très compliqué de conserver une vie sociale le temps des injections. L’infirmière m’avait dit que l’on ressentait les premiers symptômes au bout d’une semaine, soit mal au ventre, aux seins et fatigue. Personnellement, j’allais très bien, certes quelques ballonnements, mais ce sont des maux quotidiens avec l’endométriose.

Mon premier rendez-vous de surveillance se passe bien, prise de sang et échographie pelvienne, je réponds au traitement, c’est déjà un premier soulagement. C’est à l’issue de ce rendez-vous que le traitement peut potentiellement changer. J’ai la chance de passer dans les premières patientes, car la salle d’attente est pleine à craquer, certaines femmes doivent s’asseoir par terre. Je trouve que cela représente bien des problèmes sociétaux auxquels nous faisons face, entre la baisse de la fertilité, le manque de considération pour la santé des femmes et la situation critique des hôpitaux. Trois jours plus tard, j’ai un second rendez-vous de surveillance. Entre-temps j’ai commencé à m’injecter une seconde piqûre tous les soirs. J’ai moins de ballonnements, mon corps doit s’habituer. On m’annonce que c’est bon, je suis prête et je vais pouvoir faire les injections pour déclencher l’ovulation. Les infirmières m’expliquent rapidement comment faire et les deux dernières piqures sont loin d’être une partie de plaisir. En revanche, la fatigue se fait sentir entre les allers-retours à l’hôpital, la charge mentale du traitement et de la paperasse qui va avec. 

La ponction : fin du parcours ? 

Le jour-j j’arrive à l’hôpital à 7h et à jeun après avoir traversé tout Paris. J’ai une petite tension selon les infirmières, mais c’est normal. C’est très bien organisé, je descends au bloc rapidement. On me pose une perfusion et j’entre dans le bloc. Le réveil se passe en douceur. Il est possible de le faire en anesthésie locale, pour ma part, avec l’endométriose, les médecins ont préconisé une anesthésie générale. Je remonte dans la chambre, on me sert une collation et on me demande d’aller uriner pour vérifier que la vessie fonctionne bien (sinon c’est la sonde !). Le médecin passe annoncer le résultat quelques minutes plus tard. Pas le temps de digérer la nouvelle, il faut libérer le lit. La sortie est un peu speed à mon goût et en plus je dois traverser tout l’hôpital pour faire les papiers de sortie. Finalement, c’est le post-op qui a été le plus compliqué à gérer. C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que ce n’était pas un parcours anodin. Pas le droit de faire du sport pendant 1 semaine (même du yoga ou du vélo !), pas le droit de prendre l’avion pendant 6 semaines et pas le droit d’utiliser d’appareil ménager pendant 24h. J’ai eu des douleurs pendant 3 grosses journées après l’opération. Surtout une sensation de lourdeur dans le bas du ventre. Je sentais bien qu’il ne fallait pas forcer. Je marchais un peu comme une femme enceinte, ce qui est assez paradoxal. J’ai continué à me sentir fatiguée pendant une bonne semaine et à avoir des douleurs aux seins plusieurs semaines après. 

hopital

Pour ma part, ce n’est pas la fin du parcours. En effet, mes résultats sont satisfaisants vis-à-vis de ma situation, mais loin d’être suffisant pour faire une PMA. Je vais donc devoir recommencer une deuxième voire une troisième foisPour conclure brièvement, je souhaite énormément de courage aux femmes qui se lancent dans ce parcours et je souhaite que davantage de moyens soient mis en place pour faciliter ce processus qui est loin d’être simple.

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