Comment dire l’indicible ? Je vais essayer de vous parler des heures tragiques que nous venons de vivre et que nous vivons encore. Poser des mots sur une tragédie de cette ampleur va m’aider à traverser ce moment abominable. D’autre part, peut-être que mes mots réconforteront d’autres personnes.
Vendredi 13 novembre aux alentours de 21h50:
Je sors de table, j’attrape mon téléphone machinalement et je lis mon alerte BFMTV. Sur l’écran j’aperçois “fusillade à Paris”. Les premières secondes je pense à un règlement de comptes. Ça ne peut pas être un attentat, pas encore ! Pas aujourd’hui, pas après seulement 10 mois de répit. Mon père était en train de regarder le match de foot sur TF1. À la fin de la première mi-temps, j’ai entendu un bruit d’explosion. Mais étant habituée à me rendre aux matchs, j’ai tout de suite pensé à un pétard agricole, comme il est courant d’en entendre. Après avoir lu l’alerte sur mon téléphone, j’ai demandé à ce qu’on mette une des chaines d’infos. Quelques minutes plus tard, j’ai compris qu’il s’agissait d’un attentat. Le cauchemar recommence. Les minutes ou heures (je ne sais plus très bien) qui ont suivi me font encore tourner la tête. Incompréhension totale devant mon écran de télévision. Ça pète de tous les côtés dans Paris. On ne comprend pas. Il y a eu des explosions au Stade de France, mais le match continu sur TF1. Personne ne semble au courant de la situation à l’intérieur du stade, ni les spectateurs, ni les commentateurs, ni même les joueurs. On sait maintenant qu’il y a eu des fusillades au Petit Cambodge, au Carillon, à La Belle Equipe et au Café Bonne Bière. L’angoisse et la peur m’envahissent. Ils sont partout. Non ! Ce n’est pas possible ! On parle à présent d’une prise d’otages au Bataclan. La salle est pleine, 1500 personnes sont à l’intérieur ! Effroi, je tremble, je frissonne. Twitter s’affole. Moi aussi.
Vendredi 13 novembre aux alentours de 00h:
Le Président de la République fait une annonce officielle. Je reste bouche bée lorsqu’il évoque la fermeture des frontières et l’état d’urgence dans tout le pays. Je ne sais plus si à ce moment-là il parle de guerre. Mais c’est à cet instant que j’ai compris ce qu’était un pays en guerre. Que nous étions dorénavant un pays en guerre. L’intervention de François Hollande ne m’a pas rassurée, mais plutôt paniquée. Il n’était pas bien, ce qui se comprend tout à fait. Mais il avait l’air aussi paniqué que moi, peut-être même plus. Sauf que lui, il est au courant de plus de choses que nous. Et là je me suis dit que c’était que le début, que ça allait s’empirer. Toujours dans la confusion, je cherche à comprendre quel genre de personne peut faire un truc pareil. Je cherche un sens à tout ça. Il n’y en a pas, mise à part la haine et la violence. On entend les premiers témoignages. C’est un carnage. Des scènes de guerre. Je suis meurtri, tout comme mon pays. On parle de terrorisme de masse, le but était de faire un maximum de victimes en un minimum de temps. Qui peut faire ça ? Certainement pas quelqu’un d’humain. Au nom de quoi ? Certainement pas au nom d’une religion. Ces attaques simultanées me font encore tourner la tête. On parle de 5 ou 6 points d’attaques. C’est la folie. Je cherche encore et toujours à comprendre. Qu’est-ce qu’on a fait de mal ? Pourquoi ? Ils visent notre liberté, celle de boire un verre en terrasse, de sortir entre amis, de s’éclater à un concert ou à un match de foot. Ils visent notre chère culture. Barack Obama semble avoir les mots justes: “C’est une attaque contre l’humanité et nos valeurs communes”.
Samedi 14 novembre aux alentours d’1h:
Toujours scotchée aux infos et accrochée à mon fil d’actualité Twitter, je suis les évènements. Je me mets dans la peau de ses parisiens terrorisés. Je tente d’imaginer la peur des spectateurs coincés dans le Stade de France. Je crains le pire pour ceux du Bataclan. Les premiers chiffres sur le nombre de morts sortent. 20 personnes tués, puis 40, 60, 120… Ce chiffre qui gonfle au fur et à mesure est terrifiant. Je ne respire plus depuis plusieurs heures. C’est le néant en moi. Sur les réseaux sociaux une solidarité se met en place. Des témoignages de soutien émanent du monde entier. Ça réchauffe le coeur. Mais on se rend compte aussi que ce n’est pas normal, que quelque chose de très grave est en train de se produire. La situation semble se calmer, j’en profite pour aller me coucher. Je n’ai pas dormi. Une nuit de cauchemars.
Samedi 14 novembre aux alentours de 10h:
Je me lève enfin, après avoir consulté les actualités sur Twitter. Ce qui s’est passé la veille est bien réel. Un noeud dans l’estomac, une boule dans la gorge, les larmes aux yeux. Ça c’est bien produit. Hier ma capitale, Paris, a été attaquée. Des kamikazes, des terroristes l’ont envahi et ont déchiqueté l’ivresse de bonheur des parisiens. L’heure est au recueillement. Bougies, fleurs, messages de paix et d’amour. On commence à avoir une idée plus claire de ce qui s’est produit la veille. Des témoignages, hommages, soutiens viennent des quatre coins du monde. Hier, Paris a vécu l’horreur, aujourd’hui elle se relève doucement. Des centaines de personnes sont sans nouvelles de leurs proches. C’est inhumain. Des témoins prennent la parole. Ça me glace le sang. Je crois que je ne réalise pas tout à fait ce qui s’est passé. Puis vient le temps des premiers rassemblements, dans les grandes villes, à Paris surtout. Sur les lieux des drames, sur les places symboliques. La France va se relever, la France n’a pas peur, elle est soutenue par la Terre entière.
Dimanche 15 novembre:
Il faut continuer de sortir. Il faut continuer de vivre. Il faut trouver des solutions pour que cela ne se reproduise jamais.
Lundi 16 novembre aux alentours de 9h:
Visages ternis par un dur week-end, je rejoins mes camarades dans le même état que moi. Un silence lourd règne dans l’amphi. Notre enseignante n’a pas les mots. Comment parler de ce qui vient de se passer. Nous sommes tous sous le choc, traumatisés, meurtri. Puis midi arrive, moment de recueillement en harmonie avec la France, le monde. Ça ma fait du bien de sentir cette union, cette communion.
Mardi 17 novembre:
129 personnes ont péri à cause de ces terroristes. Des vies détruites, des familles en deuils. 42 personnes sont encore en réanimation. J’envoie tout mon amour et mon soutien à leurs proches. Nous avons répliqué. Envoyé nos soldats combattre ceux qui nous ont attaqués. Nous avons procédé à des arrestations, des perquisitions. C’est effroyable de voir qu’en France il y a des personnes qui possède un lance-roquette ! Où va ce monde ? Vite que tout cela s’arrête et qu’on retrouve la paix et la sérénité.
Je voudrais maintenant aborder des sujets qui prêtent plus à polémique. Je voudrais déjà parler de ce qui s’est passé à Beyrouth. Jeudi 12 novembre, Beyrouth, la capitale du Liban est attaquée. Par les mêmes terroristes que nous. Mais personne n’en parle. Le double attentat est perpétué par deux kamikazes dans les rues bondées de la capitale libanaise faisant plus de 40 morts et 200 blessés. Le Liban une nation aussi meurtrie que la nôtre. Pourtant, ils n’ont pas reçu autant de soutien que nous. Pourquoi ? Une vie libanaise ne vaut-elle pas autant qu’une vie française ? Je trouve que c’est dommage et fort triste. #PeaceforBeyrouth
Comme vous l’avez sûrement remarqué, j’ai intitulé mon article Peace for Paris. En effet, je ne suis pas totalement d’accord avec le #PrayforParis. Je pense que le mot PAIX a plus d’impact pour faire face à la situation. En revanche, j’adhère au mouvement de la photo de profil Facebook en Bleu, blanc, rouge. Voir sur tous ses amis, en tout cas en majorité, le drapeau tricolore donne une véritable impression d’unité.
Je voudrais également pousser un coup de gueule contre les voyeuristes. Ces derniers jours, on a pu voir des images sanglantes, de corps sans vie ou de personnes blessées sur internet et à la télévision. Par respect pour les victimes et pour leurs proches, je pense qu’il aurait été largement préférable de ne pas diffuser ces images. De même, certains journalistes ont été trop loin dans leur interview avec les rescapés posant des questions plus que limite. Malgré que ce soit une situation d’urgence, il faut certain un seuil de respect.
La vidéo qui suit m’a redonné foi en l’humanité. Cette dame a su trouver les mots justes.
Un autre message venant des États-Unis m’a particulièrement touché. John Oliver, animateur de la chaine HBO nous apporte son soutien…à sa façon. Ce message m’a redonné le sourire.